Parents "funambules"

Deux choses m'amènent aujourd'hui à aborder ce thème :

- J'entends et je lis des personnes qui arrivent à reprocher à l'éducation bienveillante des aspects trop permissifs vis-à-vis des enfants et trop culpabilisants vis-à-vis des parents.

Etre bienveillant n'est pas être permissif. Je suis claire sur ce point avec les parents que je rencontre : une éducation bienveillante respecte la personnalité des enfants, tout en leur donnant des limites cohérentes.  Donner des limites aux enfants est de notre responsabilité, quant à leur équilibre psychologique. Trouver le juste équilibre entre les limites et le plaisir de nos enfants est une des tâches difficile de notre job de parents. J'aime l'image de "parents funambules", qui nous ramène à cette notion d'équilibre à trouver entre laisser de l'autonomie à nos enfants et faire preuve d'autorité, sans tomber dans les excès. En effet, un mode d'éducation trop autoritaire est tout aussi néfaste car il risque de provoquer des attitudes d'inhibition chez les enfants, susceptibles de persister en grandissant. Adulte, ces enfants peuvent devenir anxieux et ils peinent à s'affirmer devant les autres. Ce mode éducatif était très répandu dans les années 70.

- Dans l'émission "La tête au carré" du 1er novembre, intervenait Didier Pleux, psychologue clinicien à Caen et directeur de l'institut français de thérapie cognitive. Ce dernier a écrit de nombreux livres et notamment "De l'enfant roi à l'enfant tyran". Son dernier livre "Le complexe de Thétis" évoque le déséquilibre entre une éducation où il n'y a que de l'amour et pas assez de frustrations. En voulant à tout prix rendre la vie plus facile à nos enfants, nous ne leur apprenons pas à affronter la réalité. Ces "enfants rois" qui deviennent des "adultes roi" ne supportent pas la hiérarchie, la moindre contrainte, passent d'une relation à une autre lorsqu'ils n'en ont plus envie...

Son discours est pour le moins direct pour les parents que nous sommes, qui se sentent parfois désarmés face à différents comportements de nos enfants. Cependant, il nous met face à nos responsabilités de parents éducateurs. Selon lui, nous devons, dès le plus jeune âge, apprendre aux enfants à agir en tenant compte d'autrui et en fonction de contraintes que nous imposent notre environnement.

Didier Pleux nous donne l'exemple d'un enfant qui se met en colère car il n'arrive pas à faire telle ou telle chose.

Oui, il est, dans un premier temps, important de mettre l'enfant face à son émotion en verbalisant sa colère et dans un second temps, laissons-le se confronter à la réalité : il va devoir renouveller d'autres fois son geste afin d'arriver à ses fins. Si le parent s'empresse de faire à sa place pour lui éviter une contrariété, il va peut être avoir le sentiment qu'il n'est pas capable de faire, et/ou il risque de penser que l'adulte est de toute façons là pour faire à sa place, alors pourquoi faire des efforts ?

Chez les enfants rois qui souffrent d'intolérance à la frustration, les premières difficultés arrivent à l'entrée à l'école. L'enfant n'est plus alors dans un monde où tout est fait pour lui. Il fait face à des frustrations qu'il ne connaissait pas, ce qui est très déroutant pour lui.

Ces comportements "je veux faire ce que je veux quand je veux" sont favorisés par l'attitude des parents. Cependant, il insiste également sur le fait que nous devons garder en mémoire que nous ne sommes pas des personnes parfaites et que l'éducation parfaite n'existe pas. Enfin, il précise qu'effectivement les parents ont une responsabilité, mais que tout ne se joue pas avec la seule sphère familiale. Notre éducation et nos premières expériences nous influencent, mais en grandissant, nous restons libres de les réinterpréter.

Revenons à la notion de culpabilité que certains ressentent lorsqu'on évoque ces erreurs de parents que nous pouvons comettre. Oui, être mis face à nos responsabilités peut être déroutant ; cependant, je pense que des discours comme celui de ce psychologue peut nous aider à nous poser les bonnes questions. Ces mots ne sont pas là pour nous faire culpabiliser mais au contraire pour nous permettre d'envisager un autre chemin.

 

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